Les quatuors de Bartók par le Quatuor Diotima

Aux Bouffes du Nord, le Quatuor Diotima relevait un défi qui tient de l’exploit : jouer les 6 quatuors de Bartók en une soirée !

Habituellement, ces oeuvres d’une exigence absolue sont jouées en 2 voire 3 soirées, pour les interprètes qui préfèrent inclure un autre compositeur pour alterner (les Alban Berg avaient par exemple choisi Mozart au TCE il y a des années de cela).

De mémoire, ma première rencontre avec les Diotima, longtemps spécialisés dans la musique contemporaine, remonte à une dizaine d’années lors d’une interprétation mémorable de Black Angels de George Crumb à l’Opéra Comique. Plus récemment, je me rappelle aussi une très belle découverte, celle de Silent Flowers de Toshio Hosokawa.

Le Quatuor Diotima a réussi son défi et donné de très belles interprétations de ces 6 chefs d’oeuvre. Le fait de les jouer dans l’ordre chronologique a permis en outre de suivre l’évolution du compositeur hongrois, en particulier du 1er au 3e voire 4e quatuor.

Un 1er Quatuor que certains décrivent comme post-romantique, et qui dans tous les cas contient des réminiscences de Beethoven (en particulier son 14e Quatuor) et a un cousinage avec Schoenberg avant sa bascule dans le dodécaphonisme.

Suivait une splendide interprétation du 2e Quatuor, qui m’a permis d’enfin pleinement savourer cette oeuvre que je n’avais pas encore entièrement comprise. Le mouvement lent final, Lento,  était d’une beauté à couper le souffle.

Après une première pause, les Diotima attaquaient le 3e Quatuor, le plus concis des 6 et le plus proche de la seconde école de Vienne. Celui qui avec le 2e m’avait le moins séduit initialement, avant une écoute révélatrice et renversante lors d’un concert du Quatuor Keller au milieu des années 90 – à la salle du Conservatoire d’Art Dramatique je crois.

Suivait une remarquable interprétation du 4e Quatuor, avec son architecture en arche et ses effets sonores inouïs.

2e pause, et on repartait pour un 5e Quatuor, également à la forme en arche,  parfaitement pensé et magnifiquement interprété.

Le concert se refermait sur le 6e Quatuor, et son Mesto (triste) qui dévore petit à petit tout l’espace musical. Un petit raté dans l’un des mouvements ne me fera pas bouder mon bonheur d’entendre cette oeuvre que j’avais étudié avec mon professeur, M. Olivier Corbiot. Cette page triste et grinçante, avec laquelle Bartók disait au revoir à sa mère et à son pays, avant de partir en exil en refus du Nazisme qui allait faire basculer l’Europe et le monde dans l’horreur absolue.

Bartók avait dans ses projets un 7e quatuor qui ne verra hélas jamais le jour, le compositeur en exil étant emporté par la maladie à seulement 64 ans.

Quatuor Diotima

Quatuor Diotima

Quatuor Diotima

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