Peter Eötvös, Christian Tetzlaff, London Symphony Orchestra, Salle Pleyel, Paris, 1 mai 2012
Peter Eötvös, Nikolaj Znaider, London Symphony Orchestra, Salle Pleyel, Paris, 2 mai 2012
Le grand compositeur et chef d’orchestre Pierre Boulez avait imaginé 2 programmes avec le London Symphony Orchestra autour d’œuvres de la première moitié du 20e siècle de Claude Debussy, Karol Szymanowski, Alexandre Scriabine et Béla Bartók.
En raison d’une recommandation de son oculiste, il a dû renoncer et choisi Peter Eötvös pour le remplacer. Les 2 hommes se connaissent bien, et le chef hongrois est aussi un compositeur reconnu.
La première soirée Salle Pleyel débutait avec Nocturnes de Debussy, œuvre en 3 parties, avec un orchestre somptueux – plus un chœur pour la dernière pièce – qui annonce La Mer. Une ouverture en beauté qui permet d’apprécier la qualité des instrumentistes du LSO.
La seconde œuvre était le 1er Concerto pour violon de Szymanowski, une pièce magnifique et méconnue. Christian Tetzlaff, l’un des plus remarquables violonistes de notre temps, a fait preuve d’une profonde compréhension de la musique en accord avec une technique exceptionnelle.
Le public ne voulait pas le laisser partir, et il nous a gratifié d’un long bis, le Melodia tiré de la Sonate pour violon de Bartók, composition pour Yehudi Menuhin et d’une incroyable difficulté. Et en parlant de grands violonistes, je suis tombé nez à nez avec Ivry Gitlis dans le hall lors de l’entracte ! 🙂
En seconde partie, Peter Eötvös a dirigé le Poème de l’Extase de Scriabine, dont le monde musical est aussi personnel que celui de Szymanowski ou Bartok, chauffant l’orchestre à blanc.
La deuxième soirée était placée sous le signe de la Hongrie et de la Pologne. Peter Eötvös et le LSO débutaient avec l’extraordinaire Musique pour cordes, percussion et célesta de Bartók. Si l’Andante tranquillo introductif – certainement la plus belle fugue orchestrale écrite depuis 1900 – n’a pas enflé d’un quasi-silence jusqu’à ce climax incroyable (comme c’est la cas dans les interprétations d’autres chefs) le point culminant lui-même et le reflux, tout comme le reste de l’œuvre ont été un bonheur pour l’oreille, le cœur et l’esprit, soulignant la structure géniale de la pièce, la variété des atmosphères et des effets, la beauté des mélodies et l’importance du rythme.
La seconde pièce était le 2e concerto pour violon de Bartók, autre chef d’œuvre, autre chance pour l’orchestre de briller, au côté du soliste. Nikolaj Znaider, dont le timbre m’a paru un petit peu « tendu » dans les toutes premières mesures, a ensuite montré toute sa musicalité et ses qualités techniques.
Le concerto est basé sur l’idée de variations, le mouvement lent central étant de forme thème et variations, et le 3e mouvement une variation du 1er ! Là aussi bonheur pour l’oreille, le cœur et l’esprit.
Nikolaj Znaider a donné un bis émouvant et superbe, la Sarabande de la 2e Partita pour violon de Bach.
Le concert se refermait avec la 3e Symphonie de Szymanowski « Chant de la nuit », qui est très rarement jouée – ou même enregistrée, le récent et excellent CD de Pierre Boulez étant l’exception qui confirme la règle ! La symphonie est étrange mais envoûtante, avec ténor (ici Steve Davislim) et chœur, sur un vieux poème persan. L’interprétation d’Eötvös à la tête du LSO et de son chœur a été excellente.
Michel
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